Faire des photos et des vidéos de la lutte en cours, les diffuser sur les réseaux sociaux ou les publier sur un blog personnel ou encore un site militant, sont devenus des pratiques courantes.
Si c’est une bonne chose de ne pas laisser la production de l’information aux seuls “spécialistes”, c’est aussi une pratique à risque qu’il convient de maitriser. Il appartient en effet à chacun et chacune d’entre nous de ne pas se transformer involontairement en auxiliaire de police.
Il va sans dire que la problématique est assez similaire en ce qui concerne les journalistes professionnels, photographes ou caméramans, qui sont nombreux autour du cortège et particulièrement lorsque cela “chauffe” un peu.
Rappelons à toutes et à tous que la police, en plus de filmer et photographier directement les manifestations et actions de protestation, procède à une collecte systématique de ce qui circule sur le web, voire dans les rédactions des agences de presse ou des médias... Et n’hésite pas parfois à faire des perquisition et saisir des ordinateurs et des disques durs pour récupérer des éléments à charge.
Pour la police cela permet en particulier :
D’identifier les “meneurs”, celles et ceux qui sont particulièrement actifs et impliqués dans le mouvement, qui seront en suite ciblés de façon sélective sur des manifs ou des actions.
De faire pression sur des militants pour leur interdire de participer à des actions directes sous peine de poursuites judiciaires.
D’inculper des gens après interpellation pour participation réelle ou supposée à des débordements.
En ces temps de lutte généralisée contre la “loi Travail”, un usage raisonné et réfléchi des images est donc plus que vivement recommandé. En particulier :
Ne pas mettre en circulation sur les réseaux sociaux ou sur le web d’images de tension ou d’affrontements avec la police où des personnes peuvent être identifiées.
Si nécessaire (et à minima même), flouter les visages des personnes qui ont oublié de se masquer le visage alors qu’elles participent aux festivités. Ne pas être timides dans le floutage, la police dispose de logiciels performant pour faire apparaître les détails et les visage sur une image (remember NCIS).
Ne pas hésiter à supprimer purement et simplement après coup des images trop problématiques. Vous raterez peut-être le prochain prix WorldPressPhoto, mais le mouvement et les camarades vous en seront éternellement reconnaissants.
Pour les journalistes reporters d’images et reporters photographes, merci de faire un éditing particulièrement serré de ce que vous soumettez aux agences ou aux rédactions. Le fait de “faire son travail” n’a en effet jamais été une excuse pour faire n’importe quoi.
Si vous avez réalisé des images d’événements sensibles que vous souhaitez archiver, ne pas les garder accessibles sur un disque dur... Il y a sur Mac, Windows ou GNU/Linux des solutions accessibles d’images disques cryptés.
Attention aussi aux services de diffusion vidéo en direct comme Periscope. Même si c’est du streaming, les images peuvent en être récupérées par la police.
La lutte n’est ni un diner de gala, ni un défilé de mode.
Samizdat.net (nextstep crew) – 8 avril 2016.