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Leur business et le nôtre / Their business and ours

mardi 5 octobre 2010, par Atelier médias libres

Une première traduction d’une série de textes publiés par Indymedia Londres sur internet aujourd’hui et l’avenir de nos sites, de nos outils. Voici un texte de Yossarian, publié fin août. Yossarian est membre d’Indy London et développeur web, notamment d’un nouveau système de publication propre à Indymedia, HyperActive. [1]

Je passe l’introduction et la première partie du texte, consacrée à ce qu’est réellement le business de Google et de Facebook (collecter des informations sur leurs usagers), pour traduire la deuxième partie à propos de la dépendance vis-à-vis des multinationales du web 2.

Hop.

Their business and ours

« (…) Ce ne sont pas seulement les aspects relatifs à la surveillance des outils des entreprises [du web] qui posent problème. Il y a également un problème de dépendance.

Pendant des dizaines d’années, les collectifs de médias indépendants ont essayé de fournir une alternative à la presse marchande, précisément parce que la presse marchande a été incapable pour des raisons institutionnelles de rapporter honnêtement ou exactement les activités et opinions des mouvements anarchistes, anti-capitalistes ou anti-systèmes. Malgré beaucoup d’échecs et de problèmes, nous avons parfois réussi, au moins momentanément, à transpercer la couverture médiatique des entreprises de presse, et à apporter à un large public la connaissance d’enjeux sociaux vitaux. C’est arrivé de manière évidente pendant des mobilisations collectives. Bien que ces moments aient leurs côtés critiquables, nous pouvons êtres fiers lorsqu’en travaillant tous ensemble, nous arrivons à fournir une telle couverture médiatique.

Le reste du temps, c’est le cycle perpétuel des portes-paroles radicaux (…) contactant un journaliste de la presse marchande ou l’un de ses rédacteurs, en essayant de surfer la vague d’une mode éditoriale assez longue pour alerter le public. C’est une activité nécessaire, mais lorsque c’est la seule stratégie, et que les médias indépendants radicaux sont traités au mieux comme le cousin pauvre de la presse libérale, il y a toujours un risque d’échec total quand le rédacteur en chef décide soit que la mode est passée, soit que le contenu politique d’un mouvement a dépassé les limites acceptables.

Le problème de la dépendance est mis en valeur quand des collectifs radicaux utilisent les services des entreprises comme la base de l’intégralité de l’infrastructure de leurs communications : Blogger pour publier des infos, Facebook pour s’organiser, Hotmail pour leur mail, et Google Groups pour les discussions collectives.

(…)

La disparition de comptes mails chez des hébergeurs commerciaux, de groupes Facebooks, etc. pour des raisons politiques est déjà une routine. En extrapolant un peu, il est inconcevable que les systèmes d’information gérés par des entreprises restent stables et fonctionnels durant n’importe quelle période de conflit social majeur. L’année qui vient verra vraisemblablement une montée en force des antagonismes sociaux, avec des coupes gouvernementales brutales dans les aides sociales d’Etat et des attaques contre le niveau de vie d’une large majorité de gens. La crise financière doit être payé par celles et ceux qui ne peuvent pas se défendre.

(…)

Il y a bien sûr des raisons pour lesquelles la plupart des anglais contre le système ont des pratiques de sécurité informatiques aussi nases, se rendant dépendant des entreprises et faisant régulièrement leur possible pour augmenter les revenus des actionnaires. Les ordinateurs et les systèmes de communication sont complexes et la plupart des personnes se sentent incapables de prendre des décisions en connaissance de cause sur des questions techniques. Et ils pensent donc, en effet, "Qui s’en occupe ? Il n’y a rien que je puisse faire à ce sujet".

L’un dans l’autre, ce n’est pas une attitude complètement stupide. Les geeks radicaux, qui devraient être ceux qui expliquent les différents choix possibles au plus grand nombre possible, fournissent peu d’explications claires et simples sur les sujets importants. Ils restent bloqués sur des questions triviales, et baragouinent un techno-langage incompréhensible. Le pire ce sont les hordes de pseudo-geeks à moitié compétents, qui ont toujours des opinions très marquées et les expriment avec bruit, alors qu’ils n’ont qu’une connaissance fragmentaire ou incorrecte de ce dont ils parlent.

Le problème est collectif, et demande un engagement collectif pour trouver des solutions, c’est-à-dire beaucoup de travail technique auquel la plupart des groupes politiques et des individus n’ont pas les moyens de faire face. Personne n’a encore fait un appel clair pour, dans un mouvement avec des objectifs politiques, arrêter l’usage des outils des entreprises, et la plupart des gens ne sont certainement pas au courant de l’ampleur des problèmes dans lesquels ils sont en train de s’embourber. Le volume de données énorme qu’ils sont en train de générer à propos de leur quotidien, réseaux d’amis ou contacts politiques, les surprendrait certainement s’ils s’arrêtaient pour y réfléchir. Et ils ne verraient pas d’alternative à leur dépendance aux outils des entreprises.

Alors, que peut-on faire ?

La première, et la chose la plus facile à faire, c’est de discuter des problèmes avec lesquels vous militez et décider (si c’est possible) ce que vous voulez faire. Alors qu’il est irréel d’imaginer que tout d’un coup tout le monde va devenir un expert en sécurité informatique, donner à quelqu’un la tâche de faire quelques recherches donnera des résultats rapides.

Si vous êtes cette personne, voilà quelques éléments que vous pourriez prendre en compte :

1. Il existe des collectifs de geeks qui essaient de combler le fosé entre les gens qui ont des connaissances techniques et ceux qui n’en ont pas, et qui essaient de fournir des conseils simples, clairs, faciles à comprendre quand il s’agit de l’utilisation d’ordinateurs. L’Hactionlab en est un exemple, ils ont récemment publié une brochure appellée "Outils techniques pour les activistes : un manuel pour les non-techniciens".

2. Il existe des alternatives non-marchandes aux outils des multinationales qui sont maintenues par des gens en lesquels vous pouvez avoir confiance. Il est facile de supprimer cette adresse mail appartenant à une multinationale. Chaque pays dans le monde a son fournisseur de services techniques (aktivix, austici, mayfirst, nadir, nodo50, riseup et beaucoup d’autres). La plupart d’entre eux proposent des services de mail sécurisés et fiables. Ils ne laisseront personne espionner vos communications, ils ont des structures techniques et légales pour défendre votre vie privée et votre anonymat, et ils font une quantité énorme de travail pour garantir la sécurité de leurs usagers et la continuité de leurs services pendant des périodes de répression intenses.

Beaucoup d’entre eux ont prouvé leur courage à travers leur mauvaise volonté à coopérer avec la police malgré les poursuites ou les arrestations. Ils font l’objet de beaucoup plus d’attention de la police que des gens pour lesquels ils font collectivement des dizaines de milliers d’heures de travail technique chaque année, quasiment tous sans être payés. Ils sont rarement remerciés, donc de la part d’un utilisateur enthousiaste : merci !

Si vous avez de l’argent ou du temps à dépenser, pensez à leur donner des sous, ils ont besoin d’accroître le spectre de leurs services. Plus important encore, ils ont besoin de beaucoup de gens utilisant leurs services, et de leur solidarité quand ils sont attaqués.

3. Sur un plan individuel, vous pouvez réévaluer votre utilisation des outils des multinationales dans les sphères non-politiques de votre vie. Si les flics observent la globalité de votre communication, qu’obtiendront-ils ? Et comment vous sentez-vous de contribuer à l’augmentation des actionnaires en donnant à leurs services ce qu’ils veulent : votre attention en tant que consommateur potentiel ?

4. Si vous êtes dans une organisation, vous devriez penser à l’utilisation des services des entreprises d’une manière plus posée et stratégique. L’une des manières pourrait être de concevoir votre usage de ces services comme d’un genre de guerilla. Les fournisseurs de service internet radicaux et les collectifs de médias indépendants joueraient le rôle de base arrière, et les services des multinationales celui d’endroits où vous bataillez pendant que vous maintenez des bases sécurisées quelque part ailleurs. Il est évident qu’il existe des centaines de millions de personnes utilisant les services de Facebook, Google, ou Blogger et il serait stupide de ne pas en tenir compte. De la même manière, énormément de personnes vont dans les centres commerciaux ou au MacDo chaque semaine. Cela ne veut pas dire que Durruti, Makhno, ou Marcos les auraient considéré comme des lieux adaptés pour en faire leurs bases stratégiques.

Pendant ce temps, ceux/celles d’entre nous qui écrivent du code informatique en soutien aux mouvements sociaux savent que nous devons faire un meilleur boulot. Il y a dix ans, nous avions le dessus, mais la stupidité épaisse du boom internet "pets.com" a tenu éloigné les codeurs radicaux qui lançaient des projets face à la concurrence des entreprises. Aujourd’hui, comment concurrencer les budgets de développement d’entreprises très intelligentes, sans avoir de sources de revenus, et avec nos rangs clairsemés à la fois par le cours des des choses et par le recrutement des capitalistes ? Nous ne sommes pas avantagés. Pourtant, nous sommes toujours là, et toujours en train de nous battre de la meilleure manière que nous pouvons : en écrivant un code fiable, respectant la vie privée, qui vous permette de travailler en dehors de la surveillance de l’état et des entreprises, et cela sans avoir la crainte constante qu’on vous tire le tapis sous les pieds.

Comme votre téléphone est devenu un ordinateur, et qu’internet est en train de se transormer de telle manière qu’il fusionne avec la rue, ce travail va être de plus en plus important. Nous vivons dans le futur, et c’est malgré vous que vous sortirez d’internet. Mais on se retrouvera de toute façon dans la rue. »


[1Je passe un peu de temps à traduire les textes d’IMC London parce qu’il me semble que ce collectif a produit ces dernières années un gros boulot de réflexion sur internet, Indymedia, etc. Je suis pas un habitué de la traduction, et j’ai moyen la patience, j’espère n’avoir pas trop tordu le texte dans tous les sens !

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